C'est une histoire, non pas vraie, mais presque : je connais le jeune homme, je sais qui il me rapelle, mais on ne se parle pas ...
"
A tous les anonymes des trains, au sosie, mais surtout, à l'Original....
Lucie"
Dans l'air humide du matin, Elle pressa le pas. Elle ne devait pas rater son train. A la gare, Elle retrouva son amie. Au bout du quai, le train arrivait. Un caillou lui frôla la jambe. Elle se retourna et vit ce garçon, grand, mais discret, ses cheveux châtains flottant au-dessus de ses épaules, sa veste tombant sur ses genoux, ses yeux d'or qui La regardaient, et son sac, qu'Il ne portait que sur une épaule lui donnaient l'air d'un lycéen parmi les autres lycéens venu prendre son train pour aller jusqu'à la grande ville. Et pourtant.... Pourtant, Elle ne Le quittait pas des yeux, ce regard et ce sourire lui étaient familiers... Elle les connaissait... Cependant, Elle n'avait jamais vu ce garçon auparavant, jamais...
Le train ralentit et s'arrêta. Evidemment, la porte était loin, et l'entrée, déjà encombrée. La seule autre personne à ne pas s'être ruée sur la porte était le jeune homme. Lorsque l'entrée fût un peu dégagée, ils avancèrent tous deux, du même pas, vers la porte du wagon le plus proche. Elle alla retrouver son amie qui l'attendait, debout, dans un coin, tandis que Lui alla s'asseoir sur un siège libre, à l'autre bout de la voiture.
Durant le trajet, Elle ne dit rien, le regardait, en cherchant dans ses souvenirs à qui Il lui faisait penser...
La descente du train ne fut pas plus confortable que d'habitude. Arrivée à l'arrêt du tramway, en face de la gare, Elle Le chercha des yeux. Une sourde envie de pleurer s'empara d'Elle lorsqu' Elle Le vit de l'autre côté de la chaussée, s'engouffrant dans un tramway qui allait à l'opposé d'Elle...
La journée passa lentement et péniblement... Elle guettait l'instant où Elle pourrait retourner à la gare, et Le revoir. Ses attentes furent vaines, Elle ne le vit pas ce soir là....
*
* *
Tard dans la nuit, Elle fouillait du regard ses photos et ses souvenirs, pour retrouver qui ces yeux d'or, ces cheveux si proprement en bataille, et cette présence lui rappelait donc.
Le lendemain, Elle arriva très tôt, trop tôt pour Lui peut-être, Il n'était pas encore là... Soudain, parmi les vagues silhouettes perdues dans la brume qui peuplaient le quai glissant, Elle devina la Sienne. Ca y était, il était arrivé. Elle sentit son coeur tressauter dans sa poitrine quand Il s'approcha en étouffant un bâillement :
" C'est pas une vie hein? Se lever si tôt pour rentrer si tard... Les journées sont longues....
- Tu dois avoir raison.... Quand je pars de chez moi, tout le monde dort encore....
- Mais ... Comment tu fais pour venir à la gare alors?
- A pied, et de même pour rentrer...
- Ok.... Moi on m'emmène.
- J'habite à un tout petit kilomètre de la gare...
- Je suis a quelques minutes.
- Où ça ?
Le sifflet du train étouffa Sa précieuse réponse..."
La bousculade habituelle eu lieu, Les laissant tous deux en arrière. Il trouva un siège libre, et Elle s'assit quelques rangées plus loin, de façon à Le voir de face.
* * * * * * * * *
* * * * * * * * * * * * * * * * *
* * * * * * * * *
Tous les matins, Elle L'attendait, au même endroit, et Ils discutaient, jusqu'à ce que le train arrive. Là, Ils s'asseyaient non loin l'un de l'autre, et se lançaient des sourires entendus, et des regards pleins de cette amitié ancrée dans l'âme depuis le début, et qui était née d'on ne sait quel sentiment anonyme.
Les vacances approchaient. Deux semaines sans cours, sans bousculade, sans trains à prendre.... Sans trains? Oui... Les vacances paraitront bien longues à ces deux amis, devenus quasi-inséparables.
C'est peut-être à cause - ou grâce - à cette impression d'urgence qu'Elle et Lui se rapprochèrent, s'asseyant à présent côte à côte dans la train, se saluant de la main lorsqu'en prenant chacun leur tramway respectif, ils s'éloignaient l'un de l'autre, se promettant doucement d'être là le matin suivant, ou le soir, si l'on était un jeudi....
*
* *
Les vacances furent pénibles pour les deux lycéens, séparés chacun de leur inséparable.
Le matin de la rentrée, le quai était désert. Elle L'attendait au même endroit que d'habitude. Lorsqu'Il arriva, Ils s'avancèrent l'Un vers l'Autre, sans bruit.
Puis ce fût comme si plus rien autour d'eux n'existait : le quai désert, le froid, les faibles lumières, plus rien...
Un interminbable baiser les unit, au chaud d'une étreinte longtemps désirée, par l'Un comme par l'Autre :
" - Je ne connais même pas ton prénom....
- Ni moi le tien....
- Parthéna....
- Marc."
Lorque les autres lycéens vinrent peupler le quai glacial , ils trouvèrent Parthéna et Marc, enlacés, ne formant qu'une seule silhouette, dans le froid mordant de ce petit matin de janvier...